[Interview] Lypso: «J'ai travaillé avec plusieurs artistes mais Blaaz est plutôt bizarre»
Ecrit par : Jaures Bradley | Lu : 4169
Créatif et ambitieux, Apocalypso (ou encore Cédrick AITCHEDJI à l’état civil) est un jeune réalisateur de clips vidéos. Toujours accroché à sa caméra, il a su se créer tôt son univers et se démarquer à travers ses productions. Il est actuellement l’un des réalisateurs les plus en vogue du pays. Nous vous proposons de mieux découvrir l’homme à travers cet entretien qu’il nous a accordé !
Bien avant la réalisation, tu étais slameur. Tiens-tu toujours à cette passion ?
Euh oui bien sûr! Mais il faut avouer que la réalisation me prend assez de temps. Du coup, je n'ai pas souvent le temps de me consacrer sur ma carrière de slameur.
Puisque tu abordes directement le sujet, le déclic pour la réalisation est venu quand ?
Je dirai après l'obtention de mes diplômes en Génie civil au lycée Coulibaly. J'étais à fond dans le slam. Mais je n'avais pas les moyens de me payer un son et des clips. J'ai dû raccrocher pour aller me faire former dans l'ingénierie de son chez un ami, Orikal Prod. Et après, j'ai commencé par travailler sur un projet dans une grande ONG qui fait dans la santé mentale. J'ai donc eu la chance de rencontrer des réalisateurs de tout horizon à qui je servais souvent d'assistant ou de guide. Et puis un jour, Antonio Guadalupi, réalisateur du film Modigliani, avec qui j'étais sur un projet de documentaire m'a dit qu'avec peu de moyens, je pouvais faire beaucoup de choses. Et là, je me suis lancé.
Tu t'es senti comment la première fois que tu as tenu un appareil dans tes mains ?
J'avoue que j'ai toujours été obsédé par cette caméra appelée canon 5d, vu que je la voyais souvent dans les mains de 100mak. Dans ma tête, il fallait que ça pour faire de bon clip. (Rire) Et aussi Xtime qui me disait tout le temps que ce qu'il me faut comme caméra c'était une 5d. Mon mentor Sylvain avec qui je travaillais dans l'ONG et qui m'avait remis une petite caméra Sony, me disait tout le temps que je quémandais la 5d qu'il fallait que je commence avec ma petite caméra et qu'un jour je pourrai m'acheter le matos de mon rêve. Aujourd'hui, j'ai pu acheter la 5d Mark II, la III et tout dernièrement la 4 que j'utilise actuellement pour mes clips.
Comment s'est donc passée ton évolution au fil du temps ?
Bah j'ai commencé par faire des essais avec nos patients de psychiatrie, vu que j'avais enregistré un album audio avec eux. Après, il y a les jeunes du quartier qui se contentaient de la qualité que j'avais dans le temps. Je m’applique à chaque fois. J'apprenais de mes erreurs et des conseils de ceux qui avaient déjà quand même plus d'expériences que moi. Puis après, j'ai pu m'acheter finalement la 5d Mark 2 avec laquelle j'ai réalisé le clip « En amor » de CCB. Ce clip était plus qu'un défi pour moi. Le résultat est apprécié de tous. Par la suite, j'ai commencé par travailler avec Xtime sur les montages et j'assistais souvent aux tournages de 100mak. J'observais comment il faisait le cadrage, les réglages, les mouvements de caméras. Cela justifie le fait que les gens qualifient souvent mes clips de « clips à la nette royale ». Alors, j'ai commencé par améliorer mon travail en faisant des recherches sur Internet et surtout en travaillant avec d'autres amis avec qui on échange souvent les idées. Je veux citer Monel Sagbo, Cass Lee, Collins, Ness, Barakell Béni, et j'en passe. Au fil du temps, les artistes me faisaient encore plus confiance pour leurs clips. Ce qui m'a permis de faire mes preuves et d'avoir aujourd'hui plusieurs réalisations à mon actif.
A quoi ont abouti tes recherches ? Autrement dit, qu'est-ce que tu as trouvé de génial et qui te démarque des autres dans tes réalisations ?
À force de chercher, j'ai découvert beaucoup de choses. Certains objectifs qui pourraient donner une certaine qualité à mes réalisations; de nouveaux réglages pour la caméra; comment utiliser correctement un stabilisateur pour un meilleur rendu de mes vidéos; plusieurs techniques de montage pour aller plus vite dans mes montages. En gros, voilà. Et un truc spécial que je fais quand je cadre aujourd'hui mes clips mais que je préfère garder pour moi. Secret professionnel !
Il t'a fallu combien de temps avant de commencer à tourner pour un artiste reconnu ?
C'est allé tellement vite que je dirai au bout d'un an après l'achat de ma caméra. J'étais sur presque tous les clips du moment et si on doit compter depuis mes débuts, au moins 3ans.
L'un des clips phares que tu as réalisé, c'est le clip "Papa Million" de Blaaz. Comment as-tu vécu cette expérience avec lui ?
« Papa Millions », il faut avouer que c'est par ce clip aujourd'hui que de nombreuses personnes m'identifient. Mais avant ça, j'ai fait aussi le clip de Pélagie la Vibreuse feat Amikpon et plein d'autres clips. Cependant, l'expérience avec « Papa millions » était unique. J'ai été contacté par Keyzit sa maison de production. Ils m'ont fait écouter le son, et j'ai kiffé. J'ai fait le repérage, et ensemble on a choisi les figurants. Blaaz a su bien coopérer du premier jour de tournage jusqu'au dernier. Ce qui a surtout facilité le boulot, c'est que j'avais déjà l'habitude de travailler avec lui. J'ai même réalisé le clip de sa collaboration « Akowe » avec Don Clovis. Je savais donc un peu comment il fonctionnait. Après pour la post prod (le montage), il a passé assez de temps avec moi. Il rentrait de temps à autre mais revenait quand même. Parce que l'idée de base (le synopsis) était la sienne. Moi j'ai juste fait mon boulot en réalisant ce qu'il voulait voir comme produit final.
Parlant de Blaaz, comment peux-tu le décrire? De notre imagination, il doit être une personne très exigeante, perfectionniste, et autoritaire !
Je dirai que c'est une personne qui sait ce qu'il veut. Je m'explique sans langue de bois. J'ai travaillé avec plusieurs artistes mais Blaaz est plutôt bizarre. C'est clair qu'il est mon aîné dans le domaine, et a beaucoup plus d'expériences que moi. Mais malgré cela, j'avoue qu'il ne m'a pas manqué de respect une seule fois pendant notre collaboration ou essayé d'user de son influence sur moi. Ce n'est pas comme certains artistes qui, du moment où ils vous ont remis leurs sous, deviennent insupportables. Il sait écouter son réalisateur, perfectionniste oui, autoritaire non pas du tout. Mais comme toute personne a ses défauts, je dirai plutôt qu'on n’a pas eu assez de temps pour le clip « Papa Millions ». Ce qui explique la pression pour que je puisse livrer à bonne date.
Généralement quand un artiste te contacte pour te confier la réalisation de son clip, comment ça se passe jusqu'à ce que le clip sorte ?
Généralement, peu importe l'artiste, je demande d'abord à écouter le son. Si je kiffe, ça va. Dans le cas contraire, j'essaie de lui expliquer que je ne pourrai pas le faire, parce qu'on ne va pas le faire que pour l'argent non plus. Si on part sur la base d'un son que j'ai kiffé, je demande toujours à l'artiste son idée de base, comment il voyait le clip quand il écrivait sa chanson. Après, je peux renchérir. Mais il y en a qui ne s'y connaissent pas du tout. Ils écrivent la chanson et ça s'arrête là. Dans ce cas, je prends mon temps de bien écouter le son, j'écris le synopsis, et je propose à l'artiste s'il a des modifs à faire. Ensuite, je fixe mon prix. S’il s'engage, je fais le repérage ou si l'artiste a déjà des lieux, je vais voir si ça correspond à mes besoins. Si oui, je cherche les figurants et danseurs. Je fixe la date du tournage et après ça s'enchaîne. Après le montage, il faut juste rendre en fonction de son inspiration.
Es-tu du même avis que ceux qui disent que la plupart des clips de la musique urbaine béninoise se ressemblent ?
Oui mais j'ai une justification. Je pense que cette jeunesse fait beaucoup pour porter haut le flambeau de la musique béninoise à travers les clips proposés aux publics et qui passent pour la plupart sur les chaînes internationales. Cependant, nous autres réalisateurs, sommes souvent confrontés aux réalités du terrain. Certains artistes qui n'ont pas beaucoup de budget, indisponibilité des figurants à la dernière minute, indisponibilité des lieux de tournage à la dernière minute. Donc, on essaie d'être génial avec peu de moyens. Pas besoin de grande chose pour faire du Bon.
Qu'est-ce que tu comptes apporter ou améliorer au niveau de la réalisation des clips 229?
Grosse question ! Je ne ferai que du bon boulot en tout cas sinon c'est le nom de ma boite Lypso Records qui en dépend. Tant qu'il reste à faire, c'est que rien n'est encore fait. Donnez-moi encore quelques années.
Un mot pour finir et un contact à laisser ?
Je dis merci à tous les artistes qui m'ont fait confiance jusque-là. Merci à tous ces jeunes qui m'écrivent pour se faire former, ou travailler avec moi. Je vous laisse ma phrase fétiche : "Ce qui est obstacle pour les autres, ne l'est pas forcément pour vous". Ce n'est pas parce que l'autre a échoué là que vous êtes censés y échouer aussi. Un contact +22966893344. Ma page facebook: Lypso Records !
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